Un appartement haussmannien présente un certain nombre de particularités dont il faut tenir compte lorsque l’on entame des travaux de rénovation. Certaines font partie de l’image et du charme inimitables des appartements de cette époque, il faut les conserver, les rénover et les mettre en valeur. D’autres sont réellement des défauts qu’il va falloir parvenir à dissimuler et à faire oublier. Au final, le but de notre travail d’architecte est de mettre en valeur le style tout en créant des appartements fonctionnels qui répondent aux besoins que nous avons aujourd’hui dans nos logements.
Qu’est-ce qu’un appartement haussmannien ?
Il n’y a pas de définition officielle de ce qu’est un appartement haussmannien. Gardons peut-être en tête que cela désigne les appartements qui ont été réalisés à une époque où toute la construction parisienne subissait l’influence des travaux administrés par Haussmann, de 1850 à 1914.
Mais si la définition n’est pas officielle, en réalité, nous savons tous très bien reconnaitre un appartement haussmannien. Les agences immobilières se contentent du trio gagnant : parquet / moulures / cheminées.
Mais il faut compter aussi avec : grande hauteur sous plafond, cimaises sur les murs, grands miroirs au-dessus des cheminées, poêle prussien dans les salles à manger, belles doubles portes vitrées dans le séjour, enfilade des pièces, balcon côté rue…Autant d’attraits qui font le charme de ces appartements.
Il ne faut pas pour autant oublier quelques défauts : long couloir aveugle desservant les chambres, entrée de service par un escalier étriqué, cuisine à l’autre bout de l’appartement, cour et courettes étroites, épais murs de conduits de cheminée, salle d’eau ajoutée en dépit du bon sens, descente d’eau en sous-nombre… Autant de points de vigilance que l’architecte doit prendre en compte dans la rénovation d’un appartement haussmannien.
Comment améliorer le plan ?
La disposition des pièces, à l’origine de la construction de ces appartements, suivait une logique héritée des hôtels particuliers et des maisons nobles. Mais le plan d’un appartement haussmannien tardif de 1890 est bien différent de celui de la première heure, vers 1850. Il n’a ensuite jamais cessé d’évoluer jusqu’à nos jours. Il évolue encore entre les mains des architectes et des architectes d’intérieur.
Le double séjour est devenu un prérequis incontournable. Nul besoin aujourd’hui de trois pièces séparées: séjour / salon / salle à manger. Une seule et même grande pièce aérée, ouverte sur la façade par plusieurs grandes fenêtres est bien plus agréable. D’une manière générale, décloisonner permet de créer des espaces plus fluides, plus lumineux et qui paraissent plus grands.
Rapprocher la cuisine des pièces de vie et l’installer dans une pièce plus grande est une demande régulière. La cuisine est une pièce de vie très occupée, la famille s’y retrouve le soir, on y dine, les enfants s’y installent pour faire leurs devoirs, on y prend l’apéritif. Personne ne veut se retrouver tout seul au fond de l’appartement et parcourir 20 m pour apporter les plats.
Assurer une bonne séparation jour/nuit : d’un côté les pièces de vie, de l’autre la partie plus intime composée des chambres,
des salles d’eau et des rangements. Au quotidien cet aménagement est plus facile à vivre, une partie de la famille peut dormir lorsque l’autre veille, sans la déranger. Elle permet aussi de recevoir sans occuper tout l’appartement.
Ajouter des salles d’eau : Pour une famille de quatre, deux salles d’eau sont nécessaires et deux toilettes (le premier indépendant et un deuxième dans l’une des salles d’eau). Les appartements haussmanniens que l’on rénove aujourd’hui (qui ont été rénovés il y a 30 ou 40 ans) ne disposent généralement pas de pièces d’eau fonctionnelles et confortables selon nos goûts actuels. Il est important d’y remédier.
Une buanderie : que ce soit dans un espace dédié, un grand placard ou un coin de la salle d’eau, cet espace est aujourd’hui indispensable. Laver, sécher, stocker, il ne faut pas négliger la place que doit occuper la buanderie.
Des rangements : fini les garde-robes trop larges ou trop étroites, encombrées jusqu’au risque de s’écrouler sur elles-mêmes. Le dressing aujourd’hui répond à des dimensions bien définies, pratiques, optimisées. À Paris, une seule règle absolue : “il n’y a jamais assez de rangement”. Alors dans l’entrée, dans les chambres, pour les livres, les vêtements, le bazar… il faut mettre des rangements partout.
Faut-il rénover le parquet ?
Dans les appartements haussmanniens le parquet est posé soit en point de Hongrie, soit en pose droite à l’anglaise à joint perdu (les abouts ne s’alignent pas). Il s’agit d’un parquet massif en chêne, posé sur des lambourdes et c’est principalement pour cela qu’il grince. Après 150 ans de service, ces parquets sont généralement en très bon état. Un coup de ponçage et un traitement suffisent à leur redonner l’éclat de leurs premières heures. Ils continuent à grincer, mais c’est aussi leur charme.
Tout au plus, il peut être nécessaire de remplacer quelques lames de-ci de-là. Les endroits les plus abimés sont les zones de fort passage (dans le couloir, au seuil du séjour, dans l’entrée), près des fenêtres (des infiltrations peuvent avoir
endommagé le sol), autour des cheminées (surtout si elles ont été retirées et qu’il ne reste que les seuils en marbre). Un parquet peut être réparé, ponctuellement. Une lame neuve se fait oublier. Mais si le ponctuel devient trop important, les réparations nombreuses, la pièce va ressembler à un patchwork, il est peut-être envisageable de tout déposer et tout refaire. Il faut alors déposer le platelage, les lambourdes et les hourdis de plâtre qui les maintiennent en place. Ne pas toucher au plancher (partie porteuse et commune de l’immeuble). Couler une chape légère pour servir de support à un nouveau parquet collé. Vous perdez le charme de l’ancien, mais vous gagnez en planéité et en confort acoustique (plus de grincement, vos voisins vous béniront).
Comment atténuer l’effet d’un long couloir ?
Le long couloir aveugle est un grand classique des appartements haussmanniens. Avec parfois plus de 10 m à parcourir pour desservir de part et d’autre les différentes chambres depuis l’entrée jusqu’à la cuisine. Étroit (généralement pas plus de 80 cm) et aveugle, il est souvent longé d’un côté par une cloison séparative et de l’autre par un mur porteur (le refend intermédiaire situé à presque égale distance des façades rue et cour).
Pour atténuer cet effet tunnel, nous pouvons :
- Le couper en deux par un décroché ou une chicane. Le but est d’interrompre cette avancée linéaire et de donner l’impression à partir d’un virage, que l’on change de zone. Pour renforcer cet effet, il est possible de changer la couleur des murs ou le revêtement de sol.
- Déposer la cloison pour installer côté couloir des rangements et des penderies. En récupérant un peu de largeur et en lui donnant une fonction (dressing, bibliothèque…) le couloir devient moins monotone.
- Ouvrir une pièce sur le couloir, totalement ou par une verrière. Cela permet d’apporter de la lumière et de créer un événement qui va rompre la monotonie.
Que faire des cheminées ?
À la construction, il y avait une cheminée dans chaque pièce. Généralement en marbre (parfois en plâtre), positionnée perpendiculairement à la façade ou dans un angle. Elles sont élégantes, travaillées, décoratives et incontournables dans un appartement haussmannien. Mais elles sont aussi extrêmement encombrantes (elles débordent facilement de 40 cm dans la pièce) et pas très fiables (le tirage n’est pas toujours optimum). Il n’est de toute façon plus permis à Paris de se chauffer au feu de bois ; un foyer ouvert ne peut être qu’un chauffage d’appoint ou d’agrément.
La cheminée du séjour ou d’une grande chambre peut être conservée, pour la beauté de l’objet ; mais il ne faut pas hésiter à supprimer celles qui gênent. Sur notre travail de réorganisation du plan, nous les déposons, parfois délicatement pour les conserver à la cave (au cas où), parfois pas. Il est alors possible de réutiliser le conduit (qui se
prolonge jusqu’en toiture). Une fois tubé il est très utile pour faire passer une ventilation, une hotte ou les conduits d’une chaudière.
Le poêle prussien (à partir de 1845) se trouve dans la pièce qui était avant la salle à manger. Il est une évolution plus fonctionnelle de la cheminée à partir du moment où les appartements se chauffaient au charbon plus qu’au bois. Le foyer est clos (moins de risques d’intoxication) et réglable (ce qui limite la consommation du charbon). L’air chaud est mieux réparti dans la pièce, une trappe en laiton cache un compartiment chauffe-plat très utilisé. Il ne déborde pas du mur de plus de 20 cm, et se positionne souvent dans un angle, ce qui le rend moins encombrant. Mais il est très présent visuellement (souvent en faïence ou en fonte de couleur sombre).
Que faire des moulures et des cimaises ?
Leur rôle décoratif est évident, mais ces éléments sont un véritable sujet lors d’une rénovation. Pensez que :
- Lorsque vous réunissez deux pièces (salon – salle à manger), vous pouvez vous retrouver avec des moulures différentes au sein du même volume.
- Si vous réduisez une pièce pour en agrandir une autre, les moulures ne vont pas suivre. Il faudra jouer avec des faux plafonds pour masquer ce détail.
- Lorsque vous faites refaire l’électricité, les moulures et les cimaises sont un obstacle au passage des réseaux encastrés. Rien d’insurmontable, mais cela prend un peu
plus de temps et coûte un peu plus d’argent. Il faut y penser.
En fonction du matériau (bois ou plâtre) et de la manière dont elles ont été posées, il est parfois possible de les démonter délicatement, les modifier ou les prolonger. Mais c’est impossible d’en être sûr avant d’avoir essayé de les démonter.
Si elles sont trop endommagées ou recouvertes de beaucoup de couches de peinture, il est aussi possible de les déposer et de les remplacer. Il existe un très, très grand nombre de modèles, dans tous les styles, en bois, plâtre, polystyrène… Une fois en place, elles paraissent avoir toujours été là!
Faut-il garder l’enfilade des pièces ?
Dans le plan d’origine des appartements haussmanniens, les pièces étaient accessibles par un long couloir aveugle central ; mais également par une autre circulation côté fenêtre. Cette longue enfilade se prolongeait de pièce en pièce par des doubles portes d’un bout à l’autre de l’appartement. Cette distribution était héritée des demeures nobles du XIXème siècle où la suite: salon – antichambre – chambre avait sa logique.
Cette disposition peut s’avérer utile aujourd’hui lorsque l’on décide de conserver (sans les réunir) les deux pièces de
réception, car une grande double porte réunira les deux espaces. Mais sans préjuger des intentions des architectes de l’époque, elle est moins utile de nos jours car la chambre n’est plus une pièce de réception, un seul accès, par le couloir est bien suffisante. Et d’une manière générale nous n’aimons pas avoir deux points d’entrée dans une chambre !
Ce passage est alors souvent fermé d’un côté pour devenir de l’autre côté, un placard ou une bibliothèque. La séparation doit être bien phonique puisqu’elle sépare deux chambres.
Où placer les pièces d’eau ?
La position des évacuations d’eau est un véritable problème lorsque l’on veut réorganiser le plan dans un immeuble haussmannien. Les colonnes d’évacuation ne sont pas toujours où l’on souhaiterait qu’elles soient. On en trouve généralement une, près de la cuisine (à un bout de l’appartement) et une autre dans la même zone, près des communs pour un WC et un cabinet de toilette (ça n’est pas avant 1880 que l’on appelle cela une salle de bains). Les évacuations d’eau sont donc toutes du même côté, ce qui laisse toute une partie de l’appartement qui ne dispose pas de colonne d’évacuation. Et où il n’est donc pas possible d’installer des pièces d’eau.
La position des pièces d’eau doit respecter cette contrainte technique et se positionner à proximité des descentes. Comptez qu’un WC ne doit pas s’éloigner de plus de 4 m de sa
descente (c’est vite atteint lorsque le tuyau fait des coudes) ; 7 m pour une douche et 12 m pour un évier. Cette distance varie aussi en fonction de la position de la culotte de raccordement sur la colonne: parfois enfoncée dans le plancher (c’est plus pratique) mais parfois très au dessus du niveau du sol (ce qui complique).
Solution de rechange : la pompe de relevage. Une machine de la taille d’une boîte à chaussures, qui fait le bruit d’une machine à laver lorsqu’elle se met en route et qui permet de conduire les eaux usées d’un bout à l’autre de l’appartement avec moins de contraintes. L’architecte, le syndic et le règlement sanitaire de la ville de Paris n’y sont pas favorables. Cela dit, si cette solution permet de sauver un aménagement, il ne faut pas l’écarter.
Comment exploiter la hauteur sous plafond ?
Dans les immeubles haussmanniens, l’étage noble (le deuxième étage) dépasse souvent les 3.20 m de hauteur sous plafond. Puis ce chiffre décroît d’étage en étage : 2.80 m aux troisième et quatrième ; 2.60 m au cinquième ; beaucoup moins dans les combles. Cette belle hauteur sous plafond est le prétexte idéal pour installer des lits podium ou mezzanine dans les chambres des enfants. Un couchage en hauteur et en dessous un volume de rangement bien utile.
Dans les pièces d’eau ainsi que dans les couloirs, cette hauteur est parfois écrasante et on peut avoir l’impression de stagner au fond d’un puit. Il est alors utile d’atténuer cet effet par des jeux de couleurs ou de moulures (un soubassement peint rétablit une échelle plus humaine). Des faux plafonds sont aussi utiles pour abaisser le niveau (15/20 cm maximum)
tout en permettant de faire passer tous les réseaux discrètement. Enfin, cette hauteur est l’occasion de dissimuler des équipements (ballon d’eau chaude) ou des rangements.
Inversement le premier étage, qui était auparavant un entresol réservé au bureau, n’affiche pas beaucoup plus de 2.30 m de hauteur sous plafond. C’est bien pour des bureaux, mais un peu bas pour un appartement. Dans l’aménagement d’un entresol, il est donc nécessaire de trouver des solutions pour gagner quelques centimètres (ou ne pas en perdre) :
- Déposer l’ancien parquet, et abaisser le plancher autant que possible.
- Déposer le plafond et laisser les poutres apparentes.
- Ne pas poser de faux plafond (qui fait perdre 12/15 cm)
Quels produits choisir ?
Pour respecter le style haussmannien et redonner tout le cachet à un appartement de ce type, il pourrait être tentant de ne choisir que des produits correspondant à l’époque de la construction. Mais cet exercice a ses limites car on n’imagine pas un instant aller chercher un robinet 1850 ou une cuvette de toilette de plus de 150 ans.
Les carreaux de ciment font leur apparition en France en 1867. Ils étaient alors principalement utilisés dans les halls où ils formaient comme un tapis d’entrée, mais qu’importe, nous sommes bien dans la bonne période, ils sont donc tout a fait recommandés.
Les appartements haussmanniens étaient chauffés au bois ou au charbon. Il faut attendre les années 1930 pour voir installer les premiers systèmes de chauffage central. Les anciens radiateurs en fonte que l’on peut acquérir chez les récupérateurs de matériaux, ou les rééditions vintages, sont donc bien postérieurs aux immeubles de la période qui nous intéresse.
Le double vitrage a été inventé en 1822, mais il n’a pas été utilisé dans l’habitation avant les années 1970. Il est aujourd’hui indispensable pour s’isoler du froid mais aussi du bruit des grandes artères parisiennes. Sur une fenêtre
ancienne, remplacer le simple vitrage par du double (ou mettre en place un survitrage) n’est pas une solution satisfaisante, cela alourdit la fenêtre, le froid et le bruit passent toujours entre les ouvrants et le dormant. Il est préférable de remplacer intégralement les fenêtres. Plusieurs marques proposent des modèles classiques (ou tradition) en bois, avec crémone apparente ou gueule-de-loup qui s’intègrent parfaitement dans un décor haussmannien tout en assurant les meilleures performances. Évidemment, ça n’est pas le même coût.
On parle déjà de papier peint en 1500, mais c’est surtout en Angleterre que le produit prend son essor dans les années 1750. En France il devient très à la mode dans les années 1850. Les nouvelles techniques d’impression à la planche le rendent plus facile à produire, plus diversifié et moins cher. Les décors sont alors souvent des trompes l’œil représentant des paysages exotiques ou mythologiques en panorama aux couleurs très saturées. Il faut attendre 1870 et les arts décoratifs pour voir apparaitre des motifs et des aplats. On en retrouve alors abondamment dans les appartements haussmanniens. La mode est complétement passé dans les années 1980, pour revenir au début des années 2000 avec des produits très graphiques qui cadrent très bien dans des intérieurs haussmanniens.
Un peu d’histoire ⸻
Haussmann et Paris
Avant Haussmann
Avant 1850 le visage du centre de Paris est encore celui d’une ville qui s’est reconstruite sur elle-même sans logique ni régulation. Paris n’est plus une ville médiévale, comme on le lit parfois, mais c’est une ville surpeuplée qui n’est plus adaptée, Il n’y pas de verdures, les ruelles sont étroites, sombres, dangereuses, mal entretenues, mal organisées, mal aérées, insalubres… entre 1832 et 1849 des épidémies de choléra en provenance d’Inde, vont emporter 45 000 Parisiens. Les classes riches dénoncent une “maladie du peuple”, fuient le
centre de Paris et s’installent dans les faubourgs à l’ouest et au nord-ouest.
Le préfet de la Seine est alors le comte de Rambuteau (de 1833 à 1848) sur la photo de gauche. Il essaye de transformer Paris en ouvrant de nouvelles voies plus larges (dont la rue de Rambuteau). Il fait construire des ponts et des places. Mais il est limité par les règles d’expropriation qui sont très favorables aux propriétaires et qui le bloquent dans ses ambitions.
Napoléon III et le Baron Haussmann
En 1852, Napoléon III (sur la photo au centre) fraichement empereur, veut faire de Paris une ville moderne et prestigieuse. Après de nombreuses années d’exile à Londres, il s’inspire de cette ville reconstruite et des théories hygiénistes de l’époque pour un ambitieux projet de rénovation de Paris. Il veut en faire une capitale moderne. Il va personnellement s’impliquer dans cette entreprise et dessine lui-même les différentes voies qu’il veut faire ouvrir. Il confie cette tâche à un nouveau préfet de la Seine : le baron Haussmann (photo de droite).
Haussmann n’a été préfet de la Seine que 17 ans, de 1853 à 1870. Mais son implication est si forte et les changements qu’il enclenche si puissants qu’on lui attribue la modernisation de Paris dans son ensemble alors qu’elle commence avec ses prédécesseurs et qu’elle se termine bien après lui.
Pour accomplir cette tâche, Haussmann va utiliser les nouvelles lois d’expropriation « pour cause d’utilité publique »
qui vont faciliter les démarches et réduire les coûts :
- L’État emprunte des millions de franc-or pour exproprier les propriétaires des terrains nécessaires à la création du nouveau plan.
- Il fait ensuite détruire les constructions et installer les équipements (eau, gaz, égouts).
- Les terrains sont ensuite découpés et revendus sous forme de lots séparés à des promoteurs qui ont l’obligation de reconstruire les immeubles en suivant les règles et le cahier des charges imposés par la ville.
C’est ainsi qu’Haussmann va ouvrir plus de 70 axes en vingt ans. Il aménage un certain nombre de parcs et jardins, organise les bois autour de Paris, construit des ponts, des gares, des théâtres, des églises, ouvre des perspectives sur les places et les bâtiments, crée les circuits d’adduction d’eau… Il étend Paris en absorbant les communes limitrophes. C’est une nouvelle ville qui se dessine peu à peu.
Les nouvelles voies ouvertes par Haussmann
De 1853 à 1859
Boulevard de Strasbourg / Boulevard de Sébastopol / le Pont-au-Change / Boulevard du Palais / Boulevard Saint-Michel / Prolongement de la rue de Rivoli au-delà du Louvre / Rue Saint-Antoine / Boulevard Saint-Germain / Pont de Sully / Boulevard de Port-Royal / Boulevard Saint-Marcel / Rue de Rennes / Rue Monge / Rue Gay-Lussac / Rue Claude Bernard / Rue Soufflot / Avenue Foch.
De 1859 à 1867
Rive droite :
Place de la République / Boulevard Voltaire / Boulevard Magenta / Rue Turbigo / Pace de l’Europe et tout le quartier alentour / Boulevard Malesherbes / Le prolongement de la rue Lafayette / Rue de Châteaudun / Quartier Monceau / Place de l’Étoile et ses alentours / Avenue Daumesnil / Avenue Georges V.
L’Opéra Garnier est inauguré en 1875 mais il faut attendre 1879 pour que l’avenue de l’Opéra soit finalement percée. Sur les deux photos ci-dessous, on reconnais à droite au deuxième plan le bâtiment qui fait l’angle entre l’avenue et la rue Louis le Grand.
Rive gauche :
Avenue Bosquet / Avenue Rapp / Avenue de la Tour Maubourg / Boulevard Saint-Marcel / Prolongement du boulevard Port-Royal / Boulevard Arago / Boulevard Raspail
Haussmann et l’immeuble
Avant Haussmann
A Paris, les façades des immeubles datant de début 1800, sont plutôt en plâtre. Le décor y est simple et pauvre avec d’éternelles moulures filantes. Autour de 1830 (époque Louis-Philippe) les immeubles en pierre sont plus nombreux, mais pas beaucoup plus travaillés. Et il faut attendre 1840-1850
pour voir apparaître des façades en pierre de taille, au dessin et aux formes plus monumentales.
Voila quelques exemples d’immeubles datant des années 1830 – 1840 – 1850.
Aujourd’hui, on qualifie d’Haussmannien tous les immeubles parisiens construits entre 1853 et 1890. Pourtant Haussmann n’a jamais rien construit, il n’est ni urbaniste, ni architecte. Dans sa fonction, en s’intéressant au plan de Paris, il s’intéresse à la rue, à l’impression qu’elle dégage et donc à l’immeuble et à sa façade. Son souhait est de créer une homogénéité dans les quartiers ainsi que dans la ville, il va donc imposer des normes strictes quant à la composition des
façades. Lorsqu’il démarre sont mandat, Haussmann s’inscrit dans la continuité de ce qui est fait par ses prédécesseurs. Il n’invente rien, mais il codifie si strictement le dessin des façades que c’est à lui aujourd’hui que l’on attribue cette typologie. L’immeuble devient ainsi un petit monument ; ce que les petits hôtels particuliers étaient, mais que l’immeuble des époques précédentes n’était pas.
Décomposition de l’immeuble Haussmannien étage par étage.
- Un rez-de-chaussée très haut de plafond pour accueillir des boutiques (dans les rues commerçantes), la loge du gardien ou des bureaux dans les rues moins passantes.
- Un entresol bas de plafond pour les bureaux reliés au rez-de-chaussée.
- Le 2éme étage, est le plus « noble », très haut de plafond, il dispose d’un balcon, il est richement décoré.
- Les 3éme et 4éme sont moins riches et sans balcon.
- Le 5ème étage dispose d’un balcon mais il est moins décoré que celui du 2ème. Il n’est là que pour surligner la façade. Cet étage souffre de la chaleur des combles et de la proximité avec l’étage des domestiques dont il n’est généralement séparé que d’un mince plancher.
- Des combles avec une toiture à 45°, en zinc. La charpente légère permet de loger les chambres de services sous les toits.
Contrairement à l’idée reçue, l’immeuble haussmannien de cette époque n’était pas destiné à une population fortunée (qui vivait plus volontiers dans de petits hôtels particuliers que dans des logements collectifs). On y trouvait généralement un propriétaire qui occupait le deuxième étage (le plus noble) et la petite bourgeoisie, locataire, installée aux étages suivants. Les combles étaient occupés par les domestiques ou par des locataires à faibles revenus.
Ci-dessous quelques immeubles datant de 1860 – 1870
Une composition monotone
La même répartition se répète d’une parcelle à l’autre, les lignes horizontales se prolongent d’un immeuble à l’autre, pas de retraits, pas de saillies : il s’agit de véritables murs qui enserrent la rue. Les parcelles sont régulières, les hauteurs identiques, le nombre de percements est le même, tous semblables. La distribution intérieure est analogue et les façades se ressemblent beaucoup. Et on va finir par reprocher à ces immeubles une trop grande similitude et une certaine monotonie. Cette uniformité, trop stricte, sera remise en cause en 1882 où une nouvelle réglementation va permettre plus de fantaisies, surtout au niveau du toit et des derniers étages.
La destitution d’Haussmann
En 1870, Haussmann est finalement destitué. On lui reproche surtout la dette qu’il laisse derrière lui car les travaux ont couté 3 fois plus cher que prévu. Les manœuvres financières douteuses qu’il à mises en place ont profité aux spéculateurs au détriment des petits propriétaires. Mais il ne sera jamais coupable d’enrichissement personnel.
Au bilan d’Haussmann
- 64 km de nouvelles voies construites.
- 20 000 immeubles détruits.
- 30 000 immeubles construits.
- 80 000 arbres plantés.
- 80 squares créés
- 600 km d’aqueduc pour distribuer l’eau.
- 340 km d’égouts percés.
- 2 gares : Gare de Lyon et Gare du Nord.
- De nombreux équipements publics: l’Opéra, l’Hôtel Dieu, la préfecture de Police, le Tribunal de commerce, une mairie dans chaque arrondissement.
- De nombreuses Eglises: St Eugène-Ste Cécile (75009), Eglise de la Trinité (75009), Saint Ambroise (75011), Saint Augustin (75008).
Après Haussmann
En quittant ses fonctions, Haussmann laisse derrière lui une équipe qui va poursuivre le travail, en particulier Eugène Belgrand (ingénieur Hydraulique) et Adolphe Alphand (Ingénieur des ponts et chaussées). Dans les années qui suivent plusieurs paramètres vont faire évoluer l’immeuble et sa façade :
La réglementation de 1884
En augmentant légèrement la hauteur maximum des constructions par rapport à la largeur de la voie, cette réglementation permet de créer un étage supplémentaire en retrait de la façade. Le dernière étage s’enrichit de décors et de volumes de plus en plus subtils.
Les oriels (ou bow-window) en saillies sur la façades sont désormais autorisés, d’abord démontables (bois ou métal) puis 10 ans plus tard, maçonnés. Ce détail permet des jeux de formes et de reliefs qui manquaient aux haussmannien.
L’invention de l’ascenseur
A partir de 1880 l’ascenseur hydraulique fait son apparition dans l’habitat parisien. La conséquence principale et le renversement de la hiérarchie des étages. Le deuxième étage
noble, plus prés du bruit et de la pollution de la rue est moins prisé. A l’inverse les étages élevés, plus lumineux, plus aérés reprennent de la valeur.
La circulation et le bruit
Avec le développement de la voiture et l’augmentation de la circulation parisienne; les pièces sur la rue sont moins confortables. L’orientation sur la cour redevient intéressante et celle-ci va gagner en qualité: végétalisée, aménagée, décorée.
La réglementation de 1902
La hauteur maximum augmente encore. Les oriels et les saillies peuvent désormais se poursuivre au dessus de la corniche. Les alignements entre deux immeubles ne sont plus obligatoires. Si le style de la façade haussmannienne est très horizontale, le poste haussmannien devient beaucoup plus vertical. La fantaisie est largement permise sur les deniers étages de l’immeuble et les architectes s’en donnent à cœur joie, en privilégiant largement le style classique (pilastres, frontons…) et plus timidement “art nouveau”.
Quelques exemples d’immeubles de 1880 – 1890 – 1900